par Mathilde
J
Naviguer nécessite des compétences parfois surprenantes telles que savoir réparer une plaque au gaz car qui navigue a faim, ou télécharger un fichier grib (nom barbare donné à nos informations météo). Chaque jour apporte son lot d’avaries et il est rare que tout fonctionne sur un bateau.
Cest pourquoi ce matin j’ai eu l’immense honneur de passer plusieurs heures à assister le capitaine dans l’opération à coeur ouvert d’Alphonse (le déssalinisateur).
Alphonse se sentait mal ce matin, il avait le débit un peu faible et le voltage fluctuant. Après une série de bips plus ou moins stridents il a fallu se résoudre à l’éteindre.
Bon, nous avons des réserves d’eau sur le bateau et à moins qu’un nostalgique des baignoires pris de folie ne décide de vider nos bidons d’eau douce pour improviser un jaccuzi dans une cale, on devrait survivre. Mais il faut avouer qu’on se sent un peu nus au milieu de l’Atlantique sans source d’eau … et puis cela signifie aussi qu’on ne se douche plus (ce qui soit dit en passant ne devrait pas trop perturber Zoran). A huit dans un espace relativemet confiné la situation peut rapidement dégénérer.
Bref ! Le capitaine prend les choses en main et notre petit déjeuner terminé il est temps de s’immerger dans la cale moteur où vit alphonse. C’est un espace insoupçonné , un peu sombre et humide dans le quel résonne le grondement menaçant de quelque dragon motorisé, seulement interrompu par les chocs des vagues contre les coques et le ruissellment de l’eau.
Il s’y introduit courageusement et après avoir reniflé avec expertise le boitié de commande, il s’exclame : “C’est un problème électrique !”
Je suis un peu soulagée car devant la profusion de fils, de tuyeaux et de batteries j’avais abandonné tout espoir et commencé à faire mentalement le décompte de mes lingettes pour savoir si j’en aurai une par jour jusqu’à l’arrivée.
Heureusement pour nous pauvres mortels il existe une espèce d’humains supérieurs qu’on nomme les ingénieurs et ces gens là savent tout faire.
Je vous épargne les détails techniques car l’opération ne fût pas de tout repos, le bricolage est une activité pleine de rebondissements :
“Ca doit être le fusible, nettoyons-le avec du vinaigre blanc !
– On a que du vinaigre de vin rouge !
– Essaie quand même, au pire on fera une vinaigrette !
– Ouiiii ! Je crois que ca a marché !”
Faux espoir, Alphonse se rallume mais défaille aussitôt. Le Capitaine, qui n’est pas connu pour sa souplesse, se glisse pourtant avec aisance entre les tubes et les cables et ne perd pas un dizième de sa détermination face à cet échec. Il entreprend sans coup ferrir la lecture en anglais du manuel du dessalinisateur XB214 alors qu’en fait c’était le XB215-F qu’on avait mais pas grave ! Il en déduit qu’on peut court-circuiter le boitier de contrôle pour voir, et je suis tout à fait de cet avis. Muni tout juste d’un fil électrique de 20cm, nous forçons le moteur à fonctionner et même si ça n’a pas l’air très clair vu d’ici ça veut dire qu’il suffisait de gratter la connexion du fil jaune et vert.
Alphonse est vivant !! Apérooooo !!!